Vernissage le jeudi 24 février de 18h à 20h30
Notre monde visible n'est pas le seul : il coexiste avec d'autres.
Les fables et les contes sont des tentatives pour entrer en résonnance avec ces autres mondes.
Les enfants le sentent intuitivement car ils ont l'habitude de se cacher dans des recoins, derrière les meubles. Là ils découvrent les interstices par lesquels ces différents mondes communiquent entre eux.
Ce sont les chiens des photographies de Sammallahti qui ont inspiré ce texte de John Berger (extrait de la préface du livre "Russian way").
Les "interstices" dont il est question sont ceux qui relient les mondes humains et animaux.
La photographie peut être l'une de ces fenêtres qui nous permettent de jeter un coup d’oeil derrière cette fine barrière que nous avons peu à peu érigée entre la nature et nous.
Cette exposition rassemble quelques contributions remarquables sur ces autres mondes, habités, comme dans les fables, par des animaux qui nous ressemblent :
Hiroshi Watanabe a réalisé des portraits de singes, acteurs d'une troupe héritée d'une longue tradition au Japon. Ces "visages" d'un classicisme théâtral troublent la barrière entre les deux mondes. L'animal incarne ici un "caractère", comme dans les fables de La Fontaine ou les gravures de Grandville.
Loin de cette humanisation, la vision noire et concentrée de Giacomo Brunelli nous projette, comme en caméra subjective, dans un monde brutal et crépusculaire, à hauteur de vue de l'animal. Ce regard sur les animaux familiers nous dévoile leur face sauvage dans une nature baignée d'une lumière dramatique.
Pour Pentti Sammallahti, les chiens sont les intercesseurs privilégiés entre les mondes humains et animaux. Il guette les chiens errants, des sardines sèches dans les poches, pour les attirer et les utiliser comme acteurs dans ses incroyables scènes panoramiques de Russie.
Le regard de Michel Vanden Eeckhoudt sur l'animal est plein d'empathie et de tendresse, mais il n'exclue pas le drame, et son sourire tourne parfois au vinaigre quand il met en évidence la détresse de l'animal enfermé. Cette photographie d'une extrême virtuosité est au service d'un regard humaniste qui, au travers de notre rapport à l'animal, parle évidemment de nous.
On a parfois comparé la photographie de Masao Yamamoto au Haïku, et il est vrai que son travail a la fulgurance poétique de ces courts poèmes japonais qui retiennent l'essence de l'instant. C'est dans l'émerveillement que Yamamoto saisit les oiseaux, les singes, les papillons et les chiens : une ménagerie légère dont les petits personnages semblent à mi-chemin du rêve et du souvenir d'enfance.
Sarah Moon a entrepris avec Ilona Suschitzky une oeuvre à quatre mains, une série de photographies + dessins intitulée "Ailleurs". Partant d'une photographie de Sarah inspirée de contes, Ilona la prolonge par le dessin. La photographie suscite l'imagination et le rêve, et le dessin l'emporte dans une dimension fabuleuse.
Les animaux ont évidemment une place prépondérante dans ces contes visuels. Ce travail en cours fera l'objet d'une exposition ultérieure, mais nous présentons en avant-première l'une des oeuvres de cette série.