Exposition du 29 octobre au 23 décembre 2010
Dans le cadre du Mois de la Photographie à Paris
en partenariat avec la galerie Howard Greenberg, New York
et la collection de la Maison Européenne de la Photographie
Pour l'histoire de la photographie en couleur, l'oeuvre de Saul Leiter est une redécouverte majeure de ces dernières années. Leiter était certainement connu des spécialistes pour sa collaboration avec les meilleurs magazines de mode des années 60 et 70, mais son travail personnel des an- nées 50, étonnament novateur, était resté dans ses tiroirs. A cette époque, Leiter hésitait entre la photographie et la peinture et ses images en couleur de la rue américaine portent la marque d'un regard de peintre. Elles innovent en privilégiant la sensation pure de la couleur, la déconstruction de l'espace et de la perspective par un cadrage jouant en virtuose des reflets, des transparences, des premiers plans.
En 2005, la publication du livre Early color (Steidl) fut le premier pas vers cette reconnaissance de l'oeuvre de Leiter, confirmée ensuite par de nombreuses expositions, dont, en France, celle présentée en 2008 à la Fondation Henri Cartier-Bresson qui eut un exceptionnel succès. La même année, nous avons exposé à la galerie un choix de photographies de Early Color.
Avec cette nouvelle exposition, nous nous proposons d'élargir la compréhension de l'oeuvre de Leiter en montrant, pour la première fois hors des États-Unis, sa peinture, associée à un choix inédit de photographies en couleur et en noir et blanc.
Né en 1923, fils d'un grand rabbin de Pittsburg, Leiter était destiné à la théologie lorsque, irrémé- diablement attiré par l'art, il quitte l'université à 23 ans et décide de s'installer à New York pour se consacrer à la peinture. Il découvre peu après la photographie et commence à réaliser ses premiers clichés au Leica, en noir et blanc, dans les rues de New York. Dès 1948, il commence à utiliser la couleur, visiblement sous l'influence de sa vision et de sa pratique de peintre. Leiter offre un rare exemple d'un artiste ayant toujours et avec bonheur pratiqué en parallèle la photographie et la peinture, même si son succès et sa carrière comme photographe ont un peu éclipsé ce qu'il considère lui-même comme sa création «sérieuse» («La peinture est glorieuse. J'aime la photographie, mais je ne suis pas certain que la photographie puisse faire ce que la peinture peut.»*). Il est probable que c'est comme photographe que Leiter passera à la postérité, mais il est per- mis de penser qu'il n'aurait pas été le précurseur que l'on reconnait maintenant, s'il n'avait pas possédé cet apétit, cette jouissance pour la couleur qu'il travaillait comme une matière brute et musicale dans ses gouaches et aquarelles. Leiter n'a jamais fait beaucoup d'efforts pour promouvoir sa peinture, mais sa passion pour elle est intacte, il la pratique toujours et il a eu récemment la joie de sa première exposition importante à New York, dans une galerie connue pour représenter les peintres de la «New York School», école de l'expressionnisme abstrait. Nous sommes donc heureux d'avoir le privilège de présenter simultanément, et pour la première fois, les deux faces de l'oeuvre de Saul Leiter avec cette exposition. * Citation tirée d'un entretien avec Sam Stourdzé (préface du catalogue de la Fondation Henri Cartier-Bresson).